dimanche 15 juin 2008

Le flux

Auparavant on dénonçait le bruit, ou « un Oreste qui occupe à plein le volume, recto et verso » (Juvénal, sat. 1), aujourd’hui il y a le flux. Nous sommes nettement dans l’ère des contenants. Nous avons de nouveaux tuyaux, de bons gros tuyaux, très performants, et chacun lutte pour faire passer le plus de flux au plus grand nombre possible de monde par son bout de tuyau. Ce qui y passe transite très vite, laisse très peu de traces. Mais ce n’est pas important, l’essentiel c’est que ça passe, et surtout sans discontinuer. Car la moindre interruption pourrait rendre le tuyau caduc.

Cette logique n’est pas une fatalité, car les moyens technologiques nous permettent aussi, aujourd’hui, de sélectionner, de mettre de côté et d’apprécier à notre guise, à notre rythme. Se nourrir et non consommer. Il en va de même dans l’échange d’idées.

Ce que je regrette le plus au contact de ceux qui sont animés par la course au flux, c’est qu’il n’est jamais possible de discuter longuement, patiemment, complètement, sur UN sujet, et d’en épuiser tous les aspects. Convaincre, mais concéder aussi - j’ai toujours grand plaisir à voir mon opinion se nuancer, évoluer. Le dialogue est parasité par la paresse de la pensée, les esquives permanentes et le souci pathologique de sa petite personne. Pour eux, l’échange est souhaitable dans la mesure où il augmente leur flux.

Pour ma part, j’ai toujours choisi la rareté. Peu mais bien, intense, fertile, excitant.

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