vendredi 29 mai 2009

Les radins

Parmi mes différents lieux de résidence, je dirais que le Québec est le lieu où j'ai trouvé la plus grande proportion de radins. Dans mes fréquentations, j'ai maintes fois noté ce petit calcul mental, ce regard du coin de l'oeil, où cette hésitation au moment de payer qui dénote quelqu'un qui est près de ses sous.

La palme d'or du plus grand grippe-sous que je n'aie jamais rencontré dans ma vie revient à un type de Montréal, dont les stratégies pour ne pas payer étaient aussi élaborées que transparentes. Je le regardais faire avec fascination, et je développais des stratégies pour constater jusqu'à quel point il pouvait pousser le bouchon. Il s'était invité chez moi plusieurs fois sans jamais rien offrir, venant renifler au-dessus de mes casseroles quand je faisais à manger pour quêter une pitance. Un jour, pris d'un semblant de mauvaise conscience, ou alors informé du fait qu'il faut parfois offrir en retour si l'on veut que la générosité d'autrui ne s'assèche pas, il décida de me faire à manger. Or, il manquait d'ingrédients. Pour le tester, je me suis offerte pour aller faire l'épicerie, j'ai ramené les légumes, la viande (c'est-à-dire l'essentiel du repas), et j'ai tout posé sur la table. Il a cuisiné son plat, sans jamais me rembourser. Il m'a donc invitée à un souper que je payais moi-même ! Il y a mille anecdotes avec ce type, qui ne pourra jamais être mon ami, mais que j'observe avec un oeil d'anthropologue. Récemment, il s'est marié, et je suis allée à son mariage, pour rigoler, et en me délectant de n'offrir rien. J'ai refusé de contribuer à la bouffe que quelques amis voulaient lui offrir le lendemain.

Hier, un autre "ami", que je crois aussi radin, m'a invitée au spectacle Cavalia, connaissant mon amour des chevaux. J'ai compris qu'il avait pris les places les plus chères. J'ai donc fait bonne figure, pour qu'il soit heureux de sa soirée, bien que le spectacle m'ait légèrement ennuyée. Je ne suis pas très adepte des mythologies scéniques, engluées dans des éclairages et des musiques lourdes, je trouve cela excessivement démagogique, et un rien insultant envers le niveau intellectuel des spectateurs. J'ai d'abord essayé de comprendre son accès de générosité, et puis j'ai préféré accepter sans arrière-pensées son cadeau, la générosité consistant aussi, parfois, à savoir recevoir sans réfléchir.

samedi 9 mai 2009

Valeur sûre

Rien de tel que d'avoir un ennemi con, narcissique et bavard. Tout ce qu'il, tout ce qu'il fait, renforce la satisfaction de voir fonctionner à plein régime notre efficace herméneutique. S'il est vraiment con, il ne nous trahira jamais. Pas d'imprévu, pas de fluctuation, une valeur sûre. Chaque fois que je le vois ou l'entends, je peux éructer un bon "quel con", qui fait tant de bien.

On devrait pouvoir pouvoir acheter du con à la bourse, la matière première ne ferait jamais défaut, et on serait à l'abri de toute crise.